24. FOURNIRET LE BLANC, ET LE NOIR

Pour mieux cerner la personnalité des accusés, il est d’usage de convoquer ceux qui les ont bien connus à la barre.  Dans cet exercice difficile, le frère de Michel Fourniret a forcé le respect. Sa pertinence et son humanité ont su toucher les familles des victimes

78 ans, de l’énergie et du bon sens à revendre. Le frère de Michel Fourniret a incontestablement donné un nouveau tour au procès. “Je vais faire de la peine aux familles parce que je vais décrire quelqu’un de sympathique. Je n’ai pas envie de défendre un assassin, mais je n’ai pas non plus le droit d’attaquer trop fort un consanguin.” Il écarte pourtant le mythe entretenu par son frère d’une intelligence supérieure. C’est un bon technicien, je l’aurais pris comme employé.” Il le qualifie “d’intellectuel raté” pour qui le sexe est un moyen de dominer. “Il veut dominer le monde. Il aurait pu faire de la politique.” Il balaye aussi d’un revers de main les attouchements que Michel Fourniret dit avoir subi enfant de la part de sa mère pour expliquer ses dérives sexuelles. “C’est nul et non avenu. Le sexe lui donne un sentiment d’autorité, de domination. Ça fait 4 ans que je cherche. Il y a le frère que j’ai connu, bourru mais sympathique, et l’assassin.” Et pour expliquer le silence de son frère : “ Le Michel Fourniret qui est là est un martyre dans sa tête. C’est comme ça qu’il tient. Il y a deux Michel, le blanc et le noir. Et là, on l’oblige à les recoller. Il est coincé, et le jour ou le blanc découvrira ce que le noir a fait, le mental n’y résistera pas il deviendra fou, il se suicidera.”
Pensez vous, demande la mère d’Isabelle Brichet, qu’il aurait parlé à huis clos ? Oui, mais il n’aurait rien dit.” Quand le président le félicite sur la finesse de son analyse, parce qu’elle n’a presque rien à envier aux 300 pages des rapports d’expertises, le frère aîné  s’excuse .”J’espère que je n’ai pas le langage empoulé dont il vous abreuve.” Il lâche quelques mots sur la difficulté d’être le frère de Michel Fourniret, et se tournant vers le banc des parties civiles : “Je n’ai pas le droit de me plaindre de quoi que ce soit devant les familles. Je voudrais leur dire en les regardant droit dans les yeux, toute l’affection que je leur porte, et si je peux faire quelque chose, je le ferai. En lisant  sur les lèvres on entend les parents dire merci.

 

Monique Derrien

Reporter puis grand reporter à Radio France de 1987 à 2016. Prix du Grand Reportage de Radio France. Chronique judiciaire régulière et assidue des petits et grands procés : Chanal, Heaulme, Fourniret. Attention soutenue sur les audiences et faits de société et sur la politique, un peu. Parce qu'ils disent presque tout du monde qui nous entoure. Intérêt marqué pour la culture, la gastronomie et le champagne. Celui qui se boit et celui qui a su si bien se vendre jusqu'ici.

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