SOURIRE…EN ATTENDANT L’EXPULSION

Ils arrivent de Georgie, d’Albanie, du Kosovo, du Gana ou du Nigéria et ils étaient à la rue. Cinquante personnes dont la moitié sont des enfants. Ils ont investi cet ancien foyer pour mineur de la rue de Cernay à Reims depuis un mois. « Parce que toute personne qui demande l’asile a droit à un logement ». C’est ce que martèlent les bénévoles qui les ont incités à s’installer dans ce bâtiment inoccupé. Un huissier leur a pourtant présenté un « avis d’expulsion sans délais » il y a 8 jours. Et depuis, tout le monde a la boule au ventre. Les enfants comme leurs parents. La décision revient a Julien Paul. Il est à la tête des Foyer Rémois, l’organisme logeur propriétaire de ce lieu hautement symbolique : avant de devenir un foyer pour mineur il avait été imaginé par Thèrèse Guérin voilà plus de deux décennies. Alors présidente de l’association Équilibre dans la Marne, elle y accueillait avec son équipe, des adultes en perdition qu’elle se chargeait de réinsérer, souvent avec succès. Mais l’endroit aujourd’hui inoccupé présenterait des risques (la présence d’amiante a même été évoquée). La moitié seulement des squatteurs peut prétendre au statut de demandeur d’asile et la moitié parmi ceux là sont des enfants. Le 115 devrait légalement les prendre en charge, mais les locaux sont saturés comme on le sait depuis longtemps. Voilà pourquoi les  bénévoles continuent à se démener. Deux autres sites accueillent des migrants à Reims. Plus précisément à Tinqueux, dans un bâtiment inoccupé mis à disposition par un promoteur, et près de la Cartonnerie, dans les anciens foyers Ozanam. Les résidents y sont accompagnés avec les moyens du bord et beaucoup de générosité, dans des conditions très acceptables. La mairie ferme les yeux sans faire beaucoup plus, par crainte du fameux « appel d’air » que provoquerait cet accueil ostensible des migrants. Mais les bonnes volontés, parfois organisées en association, ne s’épuisent pas. Elles espèrent même que le bâtiment de la rue de Cernay leur sera confié, ou loué au franc symbolique, pour qu’elles en fassent un lieu de vie transitoire mais décent, le temps que les dossiers soient instruits. Comme ont le voit  sur le site des foyers Ozanam dont les occupants « tournent » en se renouvelant d’une année sur l’autre.

Monique Derrien

Reporter puis grand reporter à Radio France de 1987 à 2016. Prix du Grand Reportage de Radio France. Chronique judiciaire régulière et assidue des petits et grands procés : Chanal, Heaulme, Fourniret. Attention soutenue sur les audiences et faits de société et sur la politique, un peu. Parce qu'ils disent presque tout du monde qui nous entoure. Intérêt marqué pour la culture, la gastronomie et le champagne. Celui qui se boit et celui qui a su si bien se vendre jusqu'ici.

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