1. SILENCE PERVERS

Les petits yeux de Michel Fourniret sont enfoncés derrières des lunettes cerclées. Monique Olivier tente de cacher la mollesse de ses traits sous un rideau de mèches grises. Sur ces deux visages fermés, on ne peut rien deviner des horreurs dont on les accuse. IIs sont terriblement communs, banals. Mais là, enfin, dans le box. Les familles de leur victimes n’en peuvent plus d’attendre ce face à face, elles se sont préparées à tout entendre. Mais Michel Fourniret annonce qu’il se taira, pour rester le maître du jeu. Monique Olivier parle, mais pour ne rien dire. Verbiage épuisant.

“On en revient toujours à la question du principe de ma participation. Mais je resterai sourd à l’intervention de la porte parole des familles qui m’a interpellé. Je me mets à leur place et je comprends l’importance de ce genre de ritualisation pour elles. Mais s‘il n’y a pas de huis clos, je ne parlerai que du bout des lèvres et il y a des tas de choses que je tairai.” Et plus sentencieux encore : « J’expose  la décision que j’ai prise au terme d’une longue réflexion. »  “ Le pire, répond le Président de la Cour, c’est ce que vous avez fait, ce n’est pas d’en parler. Reconnaissez vous les faits ?” “Si je réponds à cette question il faudra que je réponde aux autres. Ça veut dire que je ne répondrai pas !” Le procès doit durer 2 mois…et pourquoi pas 4 ou 6 tant les accusés baladent leur auditoire. Monique Olivier ne s’en prive pas, elle qui jure la main sur le cœur de dire rien que la vérité…mais contredit ses premières dépositions, auprès des enquêteurs belges en 2004. Il faudra donc s’appuyer sur les éléments matériels du dossier pour la ramener à la réalité. La découverte du corps d’Isabelle Laville, par exemple. La première victime connue du couple était bâillonnée, droguée, assommée par du Rohypnol, rien à voir avec les calmants dentaires qu’elle prétend lui avoir administrés, tentant ainsi de minimiser son rôle. Bref, on tourne en rond, et Michel Fourniret n’arrange pas les choses. Car il n’a qu’un seul but : se donner de l‘importance en jouant de son silence. Ce qu’il admet avec complaisance. “Je suis comme un gagne petit qui aurait économisé toute sa vie et qui irait à Las Vegas perdre tout d’un coup. Retenez contre moi le plus accablant.” “Mais pourquoi vous présentez vous comme un monstre ?” interroge le Président Latapie. “Je suis un monstre, de vertu ou d’autre chose, allez savoir ! “ Justement, on en sait de moins en mois et on sature.

 

A suivre : MARIE

Monique Derrien

Reporter puis grand reporter à Radio France de 1987 à 2016. Prix du Grand Reportage de Radio France. Chronique judiciaire régulière et assidue des petits et grands procés : Chanal, Heaulme, Fourniret. Attention soutenue sur les audiences et faits de société et sur la politique, un peu. Parce qu'ils disent presque tout du monde qui nous entoure. Intérêt marqué pour la culture, la gastronomie et le champagne. Celui qui se boit et celui qui a su si bien se vendre jusqu'ici.

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