19. JOËLLE PARFONDRY

Joelle Parfondery a survécu aux agressions que Michel Fourniret lui a infligé dans le salon de toilettage pour chien qu’elle tenait à Namur. Les faits remontent à 13 ans quand elle les restitue devant la Cour d’Assises des Ardennes. Elle est vivante, mais anéantie. Sa souffrance est palpable, insoutenable pour les parents des autres victimes qui mesurent ainsi toute l’horreur que leurs filles ont subie avant de mourir.

Elle s’appuie à la barre comme un oiseau blessé. C’est une jeune femme frêle et surtout détruite. Pendant des années elle n’a pas pu sortir de chez elle, elle n’a pu faire confiance à personne avec l’angoisse permanente de se retrouver en face de Michel Fourniret. Tous les hommes sont devenus des agresseurs en puissance. Il a joué avec elle, l’obligeant à se dénuder sous la menace d’un révolver, mais pas seulement. Il a fallu qu’elle fasse aussi semblant d’implorer ses faveurs. “On est obligé de collaborer” dit-elle. Et on comprend qu’aujourd’hui encore, ce souvenir là est sans doute le plus douloureux. Joelle Parfondry a eu la présence d’esprit de lui faire croire qu’elle était enceinte, c’est peut-être ce qui lui vaut d’être toujours en vie. “Elle est vivante, mais elle en a honte. C’est le syndrome du survivant”, explique sa psychiatre. “Elle s’en veut d’avoir survécu quand les autres sont mortes.” Elle souffre d’une angoisse majeure ravivée par ce procès, mais aussi par des scènes de violence à la télévision ou par le parfum d’une mandarine, semblable à celle qu’il lui a enfoncé dans la bouche. Tous les hommes sont devenus des agresseurs en puissance. Pendant des années elle a eu peur de reconnaître sa voix dans la voix de chacun de ceux qui s’adressaient à elle, elle a eu peur de se trouver en face de celui dont elle n’a vu que les yeux bleus derrière le deux orifices d’une cagoule noire achetée tout exprès par Monique Olivier. Et puis, neuf ans plus tard, l’épouse a fini par parler et c’est par la presse que Joelle Parfondry a fait la connaissance de son agresseur et de ses crimes. “Depuis il est à la télé, dans les journaux, partout, et ça ravive son angoisse,dit son mari. Elle souffre en silence, elle n’a plus goût à la vie mais elle a encore de belles choses à donner.” Aujourd’hui elle a trouvé le courage de parler devant la Cour d’Assises grace au soutien des familles des victimes. C’est une première victoire.

Monique Derrien

Reporter puis grand reporter à Radio France de 1987 à 2016. Prix du Grand Reportage de Radio France. Chronique judiciaire régulière et assidue des petits et grands procés : Chanal, Heaulme, Fourniret. Attention soutenue sur les audiences et faits de société et sur la politique, un peu. Parce qu'ils disent presque tout du monde qui nous entoure. Intérêt marqué pour la culture, la gastronomie et le champagne. Celui qui se boit et celui qui a su si bien se vendre jusqu'ici.

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