ADOS, VIOLENCE ET VIDÉO

QUAND LES COUPS FONT LE BUZZ DEVANT LE COLLÈGE

La violence des coups est sidérante parce qu’ils sont portés à une adolescente par un garçon de 13 ans aux portes de leur collège. Et devant des élèves qui assistent à la scène ou qui la filment avec application,  jusqu’à ce que d’autres arrivent au secours de la jeune fille.

Pire encore, la vidéo est émaillée de rires ou de commentaires aussi sobres que glaçants, tel cet “écrasement de la tête” calmement annoncé quand l’agresseur use effectivement de son pied pour neutraliser sa victime, allant jusqu’à faire pression sur son larynx.

FRAPPER SANS MOBILE

L’affaire aurait pu se résumer à un dérapage de plus de la part d’un élève difficile déjà connu pour son agressivité et ses difficulté scolaires au sein du Collège Saint Rémi. Le psychiatre qui l’a examiné après son arrestation signale d’ailleurs une absence de remords et un risque de récidive important. Ce qui en ferait un garçon dangereux malgré l’absence de pathologie psychiatrique. Il est poursuivi pour des faits de violences volontaires aggravés (passible de 3 ans et demi de prison ) et placé sous contrôle judiciaire dans un centre éducatif fermé. L’origine de ce déchaînement de violence est pourtant totalement futile. Il reste difficile à comprendre pour qui n’est pas initiés aux codes d’une adolescence qui échange ses histoires et ses images par l’intermédiaire de l’application SNAPCHAT. Ici ce sont des insultes entre deux filles de son collège qui auraient conduit l’agresseur à se poser en justicier en prenant fait et cause pour l’une d’elle. Mais l’embrasement qui a suivi sur le net est peut-être plus violent encore que les coups.

LA VIOLENCE EN SPECTACLE

Car la vidéo difficilement soutenable de cette agression s’est propagée comme une traînée de poudre. Les suites judiciaires qui sont données à cette affaire viennent rappeler que ces pratiques constituent un délit. Trois autres élèves du collège (une fille et deux garçons) sont ainsi mis en examen dans un dossier qui cumule la “non assistance à mineure en péril”, et ”l’enregistrement et la diffusion de faits de violences volontaires aggravées”. Ils risquent des peines allant jusqu’à 3 ans et demi d’emprisonnement dont deux ans et demi pour la seule diffusion de cette vidéo qui a été rapidement retirée…mais il était trop tard. Elle reste accessible à qui sait surfer sur internet. Les trois mineurs « diffuseurs » ou « spectateurs passifs » feront l’objet de mesures pénales à visée éducatives et préventives. “L’instruction, indique  le Procureur de la République Matthieu Bourrette, devra faire toute la lumière sur ce qui a pu expliquer un passage à l’acte aussi violent et des comportements inconscients et irresponsables de voyeurs oublieux de la réalité des faits, surfant sur le virtuel et sur l’image, paraissant banaliser leur rapport à la violence…Je ne laisserai passer aucun acte délictueux dans ce dossier qui pourrait s’apparenter à des logiques individuelles ou collectives de vendetta”. La tâche est immense

Monique Derrien

Reporter puis grand reporter à Radio France de 1987 à 2016. Prix du Grand Reportage de Radio France. Chronique judiciaire régulière et assidue des petits et grands procés : Chanal, Heaulme, Fourniret. Attention soutenue sur les audiences et faits de société et sur la politique, un peu. Parce qu'ils disent presque tout du monde qui nous entoure. Intérêt marqué pour la culture, la gastronomie et le champagne. Celui qui se boit et celui qui a su si bien se vendre jusqu'ici.

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