LE RACISME EST UN DÉLIT MÊME SUR UN GROUPE PRIVÉ DE FACEBOOK

UNE INSTITUTRICE RETRAITÉE  EST CONDAMNÉE

Le Tribunal Correctionnel de Châlons-en-Champagne vient de le signifier dans un jugement. Les commentaires injurieux d’une enseignante retraitée, postés sur un groupe privé de Facebook  après l’interview télévisée d’une élue d’origine maghrébine, sont bel et bien réprimés par la loi. 

« Voir l’adjointe Fatma Djemilai (je ne sais même pas écrire son nom). Apparu (le maire de Châlons-en -Champagne,ndlr) n’a qu’à nommé(sic) des gens avec des noms français”. Ces propos ont été publiés sur Facebook à l’intention du groupe  « Tu sais que tu as habité Châlons-en-Champagne ». Mais il n’avait de privé que le nom, puisqu’il compte en réalité une dizaine de milliers de membres, autrement dit près du quart de la population châlonnaise. D’abord poursuivis devant le Tribunal de Police comme une provocation non publique, les faits ont été requalifiés en injures publiques envers un particulier en raison de sa race de sa religion ou de son origine, en l’occurence envers de Fatima Djemai, adjointe au maire de Châlons-en-Champagne chargée du cadre de vie et du développement durable. Cette fille de harki  musulmane revendique ses origines et sa nationalité française avec la même fierté. C’est ce qui a motivé sa plainte. Ainsi l’internaute poursuivie devra-t-elle payer une amende de 1000 euros, plus 300 euros de dommages intérêts et 300 euros de frais de justice. Ceci pour dédommager la victime autant que la LICRA qui s’est constituée partie civile dans ce dossier. L’adjointe au maire dit avoir été blessée par les propos de la retraitée qui, au passage, connaissait trés bien l’orthographe de son nom pour avoir compté un des fils de l’élue parmi ses élèves. Et pour Maitre Sammut, l’avocat de la plaignante, la transformation de son prénom, de Fatima en Fatma, renvoyait sciemment au surnom donné à leur bonne à tout faire par les colons d’Algérie. Nelly Beaufort, la présidente de la LICRA de Châlons-en-Champagne, déplore quant à elle qu’une institutrice ne sache pas ce que c’est qu’être français. Au point de venir expliquer au Tribunal qu’elle aurait pu écrire la même chose à propos une personne d’origine belge ou portugaise. Et il est vrai que d’autres de ses commentaires mis en ligne sur Facebook peuvent faire référence aux “portosses” parfois sommés de « foutre le camp au Portugal ». Voilà pourquoi Nelly Beaufort, se félicite de cette condamnation. Même si la discrimination dénoncée par les parties civiles a finalement été écartée au profit d’une re qualification en injures, le jugement du Tribunal Correctionnel châlonnais vient rappeler que tout n’est pas permis sur les réseaux sociaux, y compris sur un group privé. Ce qui pourrait faire jurisprudence. La prévenue n’a pas fait appel de sa condamnation qui date du 18 décembre dernier

Monique Derrien

Reporter puis grand reporter à Radio France de 1987 à 2016. Prix du Grand Reportage de Radio France. Chronique judiciaire régulière et assidue des petits et grands procés : Chanal, Heaulme, Fourniret. Attention soutenue sur les audiences et faits de société et sur la politique, un peu. Parce qu'ils disent presque tout du monde qui nous entoure. Intérêt marqué pour la culture, la gastronomie et le champagne. Celui qui se boit et celui qui a su si bien se vendre jusqu'ici.

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