PHILIPPE GILLET EST CONDAMNÉ À 22 ANS DE RÉCLUSION CRIMINELLE pour le meurtre de sa maîtresse Anaïs Guillaume, alors qu’il comparaissait pour son assassinat. La préméditation est donc écartée. Il est par ailleurs innocenté de la mort de son épouse. Mais dans les heures qui ont suivi le verdict, le Parquet a indiqué qu’il faisait appel. PHILIPPE GILLET SERA DONC REJUGÉ POUR CES DEUX CRIMES.
Avant de le condamner il a sans doute fallu que le jury de la Cour d’Assises des Ardennes se garde de la tentation de le juger sur son comportement détestable et arrogant, en dépit des trois années de détention provisoire qu’il vient de vivre. Imbu de sa personne, sûr d’avoir raison en toute circonstance, l’agriculteur de Margut ne s’est jamais remis en question, se faisant presque la caricature des rapports d’expertise qui décrivaient un homme égocentrique et narcissique…ce qui ne suffisait pas à en faire un coupable. L’analyse juridique du dossier a d’ailleurs divisé les magistrats, de Reims à Charleville-Mézières, du TGI à la Cour d’Appel. Au point que Philippe Gillet n’a été renvoyé devant les Assises des Ardennes qu’après de multiples rebondissements procéduraux. Il n’a par ailleurs jamais cessé de nier les deux crimes qu’on lui reprochait : la mort de son épouse Céline en Janvier 2012, et celle de sa jeune maîtresse Anais Guillaume qui s’est évaporée dans la nuit du 16 Avril 2013.
DES DOUTES ENCOMBRANTS
Ces deux femmes voulaient reprendre leur indépendance et Philippe Gillet ne supporte pas qu’on le quitte, en raison de son « besoin structurel de maîtriser les situations » comme l’a indiqué l’expert psychologue. Céline Gillet était au courant de la relation très forte qu’il entretenait avec Anaïs et le divorce qu’elle envisageait supposait un partage des terres que son mari aurait eu du mal à accepter. Les circonstances de la mort de son épouse, écrasée par une vache selon le récit qu’il en faisait, avait pu surprendre, mais il n’avait pas été inquiété alors. Les doutes ont évidemment ressurgi quand il est devenu le principal suspect dans la disparition d’Anaïs. Des témoins sont venus s’en ouvrir à la barre, des experts ont pointé les incohérences de la version qu’il avait livrée de cette mort accidentelle. Les blessures mortelles de Céline ne pouvaient pas être dues, selon eux, au poids d’une vache que Philippe Gillet avait d’ailleurs été incapable de désigner. Ce détail a surpris bien des éleveurs. Il s’ajoutait à un faisceau de présomptions qui n’ont pas scellé sa culpabilité pour autant.
LES TÉLÉPHONES ACCUSENT
Convaincues de son innocence, ses filles Victoria et Irina -19 et 16 ans- ont suivi le procès de bout en bout. « Au moins, commente Richard Delgenes, (l’avocat de la cadette) ont-elles la certitude que leur mère n’est pas morte sous les coups de leur père ». Mais il reste coupable du meurtre d’Anaïs, même si le corps de la jeune femme n’a jamais été retrouvé. Philippe Gillet a prétendu, sans vraiment convaincre, qu’elle était depuis longtemps à la recherche d’un ailleurs qui lui aurait permis d’avoir la vie dont elle rêvait…ou encore que ses dettes de toxicomanes l’avaient contrainte à prendre la fuite. Mais plus que les multiples suspicions, coincidences et détails troublants qui en faisaient un coupable désigné, c’est l’expertise en téléphonie qui étaye l’accusation. Elle a révélé que la jeune femme avait passé ses dernières heures chez lui, et surtout que Philippe Gillet avait manipulé les téléphones portables et cartes SIM de sa maîtresse, mais aussi de son épouse pour faire croire qu’Anaïs vivait encore. La préméditation du crime reposait essentiellement sur l’achat tout à fait inhabituel de 2 sacs de chaux vive la veille de la disparition d’Anaïs, comme s’il avait ainsi prévu de faire disparaître son corps. Pratique bien connue des éleveurs quand ils ont à se débarrasser d’un animal mort. Mais le jury n’a pas retenu cette charge, condamnant Philippe Gilllet à 22 ans de réclusion, une peine plutôt lourde pour un premier meurtre. Et d’autant plus surprenante qu’elle n’aurait pas dû, selon les textes, dépasser 20 ans puisque la majorité des voix pour une peine de 30 ans n’avait pas été atteinte. Me Fay demandait un acquittement dans les deux dossier. Il a rapidement indiqué qu’il ferait appel. Mais l’appel du Parquet, très vite annoncé, aura pour conséquence de faire rejuger l’agriculteur ardennais pour les deux crimes qui lui étaitent reprochés. L’acquittement de Philippe Gillet sur le premier est ainsi remis en question.
Un mois après le verdict de Charleville, la demande de remise en liberté de Philippe Gillet jusqu’à son procès en appel lui a été refusée