DE REIMS À RENNES, LA JUSTICE S’INTÉRESSE À UN HOMME D’AFFAIRE TRÈS PROCHE DU MEDEF

Le vice-président de l’UIMM, Christian Brethon, et le comptable Clément Brochon sont, on le sait,  conjointement visés par une plainte pour banqueroute et escroquerie déposée au parquet de Reims. Lire ici . La médiatisation de cette procédure a suscité beaucoup d’intérêt en Bretagne. Car le même Clément Brochon est indirectement concerné par une enquête ouverte à Rennes pour prise illégale d’intérêt au préjudice de Liger, une SEM très novatrice établie à Locminé. Ce modèle de développement durable est reproduit dans la Marne où il prospère depuis deux ans.

 

La plainte déposée contre Clément Brochon à Reims n’est pas passée inaperçue  en Bretagne. Car il se trouve que le champenois a aussi exercé ses talents d’homme d’affaires particulièrement habile à Locminé. Au point d’interpeller le maire de la commune de Pluméliau-Bieuzy, qui est aussi conseiller général. Dans un mail adressé au préfet du Morbihan, Benoît Quéro alerte ainsi le représentant de l’État dès le mois d’Octobre 2020. 

UN SIPHONNAGE EN RÈGLE 

L’élu y décrit un tour de passe passe dont Clément Brochon est un habitué. Il consiste à ponctionner une Société d’Économie Mixte (par ailleurs subventionnée) au profit de sociétés satellites dans lesquelles l’actionnaire Brochon apparaît souvent. Ces entreprises privées fournissent et facturent des prestations peu ou pas justifiées à la SEM, en empochant ainsi 50% de ses résultats, et indirectement de ses subventions. Benoit Quéro estime le préjudice à 500 000 Euros pour la SEM Liger. L’entreprise reste un  modèle en matière d’énergie verte. Elle s’est construite en 2016 à Locminé  autour de la valorisation des déchets agricoles  sous forme d’énergie thermique ou de biocarburant de la marque Karrgreen. Le site très prometteur a été inauguré en novembre 2016  par le président Hollande.

UNE ÉCONOMIE VERTUEUSE, ENFIN PRESQUE

Le projet est d’autant plus enthousiasmant que ces déchets, très encombrants pour les agriculteurs, sont livrés gratuitement. A Locminé, l’inventivité de Clément Brochon aura notamment  permis la création d’une société intermédiaire dont la seule vocation est de revendre à la SEM subventionnée  une matière première…qu’il n’a pas payée. L’alerte de l’élu Benoît Quéro a déclenché une enquête préliminaire pour prise illégale d’intérêt il y a 18 mois. Le dossier a été  transféré depuis peu à la Juridiction Interrégionale Spécialisée de Rennes. Les JIRS, au nombre de 8 en France, ont été créés pour lutter plus efficacement contre la criminalité organisée, notamment en matière financière. 

REIMS ET RENNES, SI PROCHES 

L’enquête est confiée à la SR de Rennes et au GIR Bretagne. Elle vise notamment un compagnon de route de Clément Brochon.  Il s’agit de l’homme d’affaire Marc Le Mercier. Il  est aussi directeur de Liger, et actionnaire de Liger Bioconcept qui gravite autour de la SEM. Et c’est justement  lui qui a porté la création d’un même centre d’excellence en énergies renouvelables sur les terrains de l’ancienne Base112 de Reims. Le projet s’est développé avec l’appui de Clément Brochon. Il était même soutenu par l’IUMM régionale, alors présidée par Christian Brethon. Le site de Betheny   s’est construit sur le modèle de Locminé, en partenariat avec l’association Terrasolis. Ils s’agit d’un pool d’une quarantaine d’investisseurs publics et privés, dont des agriculteurs. 

 

COPIER COLLER 

Les résultats des  investigations de la SR de Rennes  et du GIR breton sont donc très attendus en Champagne. Et notamment par le startuper qui, à Reims, a récemment porté plainte pour escroquerie contre Clément Brochon et Christian Brethon,  désormais Vice Président de L’UIMM pour la France. Maître Laquille, l’avocat de l’ingénieur rémois, affirme qu’ils ont détourné au moins 545 000 euros sous la forme de prestations fictives ou surfacturées par des sociétés gravitant autour de l’entreprise mère. Lire par ailleurs  Les pratiques dénoncées dans la plainte rémoise apparaissent comme un copier coller  de celles de Locminé. Elles ont aussi ruiné une ancienne usine de sous traitance automobile dans les Ardennes 

DANS LES ARDENNES DÉJÀ 

La procédure engagée par Maître Laquille a rappelé de très mauvais souvenirs à Jean Michel Coutellier. Cet ex dirigeant de l’entreprise Godart à Fumay a bien connu Clément Brochon  dans les années 2010. Il avait été présenté par l’UIMM Champagne Ardenne, alors présidée par Christian Brethon, comme le repreneur providentiel qui sauverait une entreprise vouée à la fermeture. Clément Brochon a surtout détourné les fonds et les subventions de l’entreprise rebaptisée Fab 21. Les poursuites judiciaires engagées alors n’ont pas prospéré. Fab 21 n’existe plus. Jean Michel Coutellier a brillamment reconstruit sa carrière, mais l’amertume demeure. Clément Brochon a quant à lui précipité son départ pour le sud du Portugal. Il séjourne  depuis peu au bord de la mer dans  l’ancien village de pêcheurs d’Albufeira.

A la suite de cet article la société LIGER a souhaité exercer son droit de réponse. Lire ici

Monique Derrien

Reporter puis grand reporter à Radio France de 1987 à 2016. Prix du Grand Reportage de Radio France. Chronique judiciaire régulière et assidue des petits et grands procés : Chanal, Heaulme, Fourniret. Attention soutenue sur les audiences et faits de société et sur la politique, un peu. Parce qu'ils disent presque tout du monde qui nous entoure. Intérêt marqué pour la culture, la gastronomie et le champagne. Celui qui se boit et celui qui a su si bien se vendre jusqu'ici.

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